Infolettre Alpes sans sida, mai 2024
Editorial de Olivier Epaulard, co-président du COREVIH arc alpin, et professeur d’infectiologie au CHU Grenoble Alpes
Le COREVIH Arc Alpin va disparaitre … pas les Alpes sans sida
Chères toutes, chers tous,
C’est un sujet qui a pris beaucoup de place dans les corevih depuis 2 ans : quelle articulation doit-elle être faite entre les corevih et la santé sexuelle ? Doivent-ils en être les coordinateurs, et que celle-ci devienne leur raison d’être (et dans tous les secteurs que recouvre le terme « santé sexuelle ») ; ou bien doivent-ils continuer à être des acteurs de la lutte contre le VIH, les IST et les hépatites, mais en donnant plus de place à l’approche en santé sexuelle dans ce champ ?
Après des débats et des réflexions en plénière à de nombreuses reprises, la position que portait le corevih Arc Alpin était celle de garder la lutte contre le VIH, les IST et les hépatites comme boussole, comme raison d’être ; il nous paraissait que l’objectif « fin du sida en 2030 » ne pourrait qu’être mis en danger par un passage au second plan de la lutte contre le VIH ; il ne semblait pas pertinent de mettre fin aux corevih pour les transformer en « CoReSS ».
Après un parcours guère transparent, particulièrement long, et après que de nombreux appels de la part des corevih pour plus de travail collaboratif soient restés à peu près sans réponse, l’orientation de la DGS a finalement été dévoilée début mai.
Les orientations qui sont données par la DGS sont les suivantes :
– les corevih disparaissent, remplacés par des instances de coordination régionale en santé sexuelle (sans doute, donc, « CoReSS ») ;
– la santé sexuelle est le centre de l’activité du CoReSS ;
– Les populations ciblées ne sont pas encore précisées, et une orientation population générale est possible ;
– les missions épidémiologiques disparaissent (le seul acte dans ce domaine sera « s’assurer de la DO VIH », mais sans l’effectuer) ; il n’y aura plus de recueil de données quant aux PVVIH, à la PrEP, au TPE … (il est évoqué que l’ARS puisse ponctuellement financer si elle le souhaite le recueil de telle ou telle donnée ; mais il est probable par exemple que le financement de Nadis disparaisse) ;
– plus généralement, le CoReSS ne sera pas un effecteur : il devra coordonner les acteurs en santé sexuelle pour veiller à la bonne déclinaison de la stratégie en santé sexuelle, mais pas agir en tant que comité (ce qui est une position à la fois très théorique et assez irréaliste …)
– la composition du comité change : la répartition entre les différents collèges (prof. de santé, représentants d’établissement, membres d’association, représentant des publics concernés, …) sera moins cadrée, et dans les faits n’assure plus la représentation de toutes les parties prenantes, en particulier les représentant.e.s d’usager.e.s.
En parallèle, l’ARS AuRA nous a fait part de son souhait de régionalisation de ce CoReSS : avec la possibilité d' »antennes » dans les 3 territoires, ce qui serait très différent de l’organisation actuelle, et très centralisé.
Ainsi, les corevih deviennent une autre instance, avec d’autres champs d’action, avec une autre façon de coordonner les actions, et avec une composition différente.
On pourrait se dire que c’est exactement ce dont nous ne voulions pas lorsque l’on en discutait en plénière ; et que les inquiétudes sur ce que va devenir la lutte contre le VIH en France sont plus que jamais présentes (sans compter la question du devenir des salariées du corevih).
Et maintenant : que faire ?
Quelques réflexions parmi celles dont on pourra débattre lors de la plénière extraordinaire de vendredi 17 mai : si les ballons d’essais préliminaires actuels se confirment, si les arbitrages vont bien dans ce sens, les conclusions seraient :
1) le corevih Arc Alpin disparait, et il n’y aura sans doute pas de CoReSS Arc Alpin ;
2) un CoReSS AuRA va être mis en place ; il y aura beaucoup de pertinence pour plusieurs structures actuellement membres des corevih à en faire partie ;
3) le texte de décret régissant cette transition au niveau national doit être communiqué pour relecture aux corevih dans les jours qui viennent, sans la co-construction que nous appelons de nos vœux depuis 2 ans.
… et 4) : tout ce qui a été fait au corevih Arc Alpin depuis 7 ans, tout ce que nous avons construit comme façon de travailler, toutes les approches que nous avons développées, et dont nous voyons l’impact en termes épidémiologiques – tout cela peut continuer avec Vers des Alpes sans sida : nous pouvons continuer à œuvrer ensemble, dans un cadre probablement associatif, avec une dynamique différente mais toujours présente ; et c’est cela, sans doute, qu’il faut qu’on construise dans les mois qui viennent.
Rendez-vous donc ce vendredi 17 mai en visio (12-14h), et le 17 Juin après-midi pour la plénière de clôture
A bientôt à toutes et tous,
Olivier Epaulard
co-président du corevih Arc Alpin
Chemsex – Sensibilisations et formation
Le COREVIH arc alpin organise des sensibilisations au chemsex sur les trois départements de l’Isère, la Savoie et la Haute-Savoie et une formation.
1. Sensibilisation
Dates en 2025 :
Attention, les places sont limitées à 25 participant.e.s par session !
Objectifs :
- Sensibiliser à la pratique du chemsex ;
- Apporter des outils de repérage, d’intervention, d’orientation, de réduction des risques ;
- Faire se rencontrer les acteurs de l’addiction et de la santé sexuelle ;
- Créer ou renforcer des partenariats locaux.
Pour qui :
- Pour les professionnel.le.s et les bénévoles de l’arc alpin qui souhaitent mieux comprendre le chemsex, aborder le sujet en entretien et pouvoir orienter;
- Tout.e intervenant.e des champs de l’addiction et la santé sexuelle de l’arc alpin (Centres de santé sexuelle, CPEF, EVARS, CeGIDD, associations, médecins généralistes, infirmières, pharmacien.ne.s, proctologues, sexologues …)
Pour plus de renseignements, contactez Elodie Guillois, Chargée de projets au COREVIH arc alpin : eguillois@chu-grenoble.fr
Le repérage, l’orientation et l’accompagnement des chemsexeurs suppose un réseau de partenaires vers qui orienter les personnes qui en formulent la demande. C’est pourquoi le COREVIH a rédigé des listes (non exhaustives) de structures de l’Arc alpin travaillant sur la santé sexuelle et les addictions ; ainsi que des numéros nationaux.
2. Formation
Dans le cadre du projet « parcours chemsex » du COREVIH arc alpin, nous finançons et organisons une formation « Chemsex et prises de risques: évaluation et prise en charge des complications ».
- Formateur : Gaia et le 190
- Quand ? Les 30 et 31 octobre 2024
- Où ? Annecy
- Pour qui ? Médecins, infirmiers, psychologues, sexologues recevant des personnes en demande de soins liés à des pratiques de chemsex, intervenant en CSAPA, services de psychiatrie / addictologie, médecine de ville, chargé.e.s de prévention en association, bénévoles
- Financement : financée par le COREVIH arc alpin
- Pour combien de personnes : 15 maximum
- Contenu : Plus d’information
- Attention : cette formation s’addresse à des personnes qui souhaitent prendre en charge (et non simplement connaître ce qu’est le chemsex)
- Comment postuler :
- Comme la formation est financée par le COREVIH dans son entièreté, le Bureau du COREVIH souhaite que les structures qui demandent une place s’engagent ensuite à faire du repérage et/ou de la prévention et/ou de l’accompagnement, afin que cela s’inscrive dans la mise en place de parcours santé pour les chemsexeurs sur le territoire.
- Si vous souhaitez qu’une personne de votre structure s’engage dans la formation, merci de nous envoyer un paragraphe décrivant votre projet suite à la formation (avec la candidature).
- Sur le lien suivant : https://framaforms.org/formation-chemsex-30-31-octobre-1715342885
- Date limite : 30 juin 2024
- Ex de projets :
- « Nous avons x chemsexeurs dans la file active PVVIH et pas/peu d’ETP addicto : nous souhaitons faire la pec en consultation »
- « Nous avons pour projet un temps infirmier/ psycho dédié à la santé sexuelle avec un groupe de parole chemsexeur »
- « Nous voulons ouvrir une permanence chemsex à tel endroit »
- « Nous voulons accompagner les chemsexeurs de manière communautaire en ligne et en présentiel »
- « Nous avons décidé d’avoir un temps spécifique addicto/chemsex, dans notre CPTS/maison pluridisciplinaire»
- Si nous dépassons les 15 propositions, nous ferons un choix en fonction de la pertinence du projet et de la répartition géographique et entre structures afin de permettre le meilleur maillage territorial possible suite à la formation.
ARCHIVES
– Annecy : 18 juin 2024 (Annecy) Programme – Inscriptions
– Grenoble : 02 juillet 2024 ( Grenoble) Programme – Inscriptions
– Grenoble : 14 décembre 2023 ( Grenoble) Programme – Inscription
– Annecy : 23 novembre 2023 (Annecy) Programme – Inscription
– Aix Les Bains : le 28 avril 2023 (Maison des associations, 25 Bd des Anglais) Save the date – Programme – Inscription
– Grenoble : le 2 février 2023 (lieu précis à venir) Save the date – Programme – Inscription
– Annecy : 12 décembre 2022 (IFSI, CHANGE, av de l’hôpital à Epagny Metz Tessy) Programme – Inscription
Chemsex en arc alpin : quelles sont les ressources ?
Le repérage, l’orientation et l’accompagnement des chemsexeurs supposent un réseau de partenaires vers qui orienter les personnes qui en formulent la demande.
Trois annuaires ont été développés sur l’arc alpin afin de faire connaitre les réseaux existants et les partenariats locaux possibles. Les structures listées (non exhaustives) travaillent sur la santé sexuelle et les addictions. Sont donc répertoriés les CAARUD, CSAPA, CeGIDD, associations, services hospitaliers d’addictologie, réseaux ELSA, sexologues…etc. du territoire et des numéros nationaux.
Grâce à ces annuaires vous pouvez orienter les personnes selon leurs convenances, lieux de vie et le type de professionnels recherché.
Le COREVIH organise par ailleurs des sensibilisations au chemsex.
Alpes sans sida Infolettre Septembre 2022
Editorial, Olivier Epaulard, Président du Corevih Arc Alpin, infectiologue CHU Grenoble Alpes
Cher.e.s tou.te.s,
Voici septembre, mois de reprise après un temps de repos, de ressourcement, de réflexion, ou de « lâcher prise »… Beaucoup auront cependant été « sur le pont » cet été, du fait de l’épidémie d’infection par le virus Monkeypox : La variole du singe, connue depuis une cinquantaine d’années, et qui circulait dans certains pays d’Afrique de façon parfois intense (plusieurs milliers de cas chaque année) est devenue, en Europe et en Amérique du Nord, une infection sexuellement transmissible, touchant de façon presque exclusive les HSH. Dans un premier temps, l’urgence a été au diagnostic, afin de permettre aux personnes atteintes de s’isoler ; certaines ont dû être hospitalisées, du fait d’importantes douleurs liées aux vésicules cutanées et muqueuses ; la vaccination contre la variole humaine offrant une protection contre la variole du singe, et un vaccin de 3ème génération étant disponible depuis une dizaine d’années, c’est une campagne vaccinale qui s’est ensuite mise en place.
Les marqueurs épidémiologiques font maintenant état d’une diminution des cas semaine après semaine, en France*, en Europe**, aux USA***.
Il était presque impossible de ne pas vouloir faire de parallèle avec la pandémie du VIH : circulation virale liée à l’orientation sexuelle (voire au travail du sexe) ; communication des autorités perçue comme insuffisante et inadaptée ; sentiment que la réponse en santé publique (diagnostics, vaccins) était sous-dimensionnée, et perception par certain.e.s que cela reflétait une moindre préoccupation de l’Etat pour les populations à risque ; contexte favorisant, hélas, l’expression d’une homophobie par certains acteurs.trices politiques …
Beaucoup de choses séparent cependant ces 2 maladies : le caractère exceptionnellement grave de la forme prise actuellement par l’infection par le virus Monkeypox ; son caractère systématiquement aigu, résolutif en quelques semaines ; son caractère immunisant (personne, probablement, ne fera 2 infections à virus Monkeypox) ; la présence d’un vaccin …
Surtout, même si elle a été parfois maladroite, la mobilisation des acteurs.trices de santé, avec en parallèle celles des associations, ont permis une diffusion des informations, la mise en place du diagnostic dans la plupart des départements en un temps record, la commande rapide auprès du seul laboratoire au monde fabricant le vaccin de stocks supplémentaires, et la mise à disposition (même si elle aurait pu être décidé 2 semaines plus tôt, en juin) des doses de vaccins progressivement disponible pour une vaccination préventive. La communication trop timide auprès du grand public (et pas seulement dans les réseaux de communications des publics à risque), et celle par exemple autour du report transitoire de la 2ème dose, font partie peut-être des « couacs » de cette campagne.
Il n’en reste pas moins qu’une réponse ciblée s’est mise en place ; et pour le coup, elle doit tout à l’expérience acquise dans la lutte contre le VIH. Concertation avec les populations à risque ; communication sans stigmatisation ; discours ne cherchant pas à culpabiliser les publics exposés, mais à mettre à leur disposition les tests et (une fois qu’ils étaient disponibles) les vaccins ; et malgré des sorties lamentables de tel ou telle député ou ministre, une absence de dérapage du discours public.
Cette épidémie a ainsi illustré à quel point la lutte contre le VIH a changé la façon dont la médecine voyait les personnes, et la façon dont la santé publique voyait les populations – et que malgré les inerties qui se sont encore manifestées cet été, il n’était plus possible d’agir pour les personnes concernées sans les associer à toutes les réflexions et décisions. Elle a aussi illustré tout ce qu’il reste à franchir pour que les autorités de santé déclinent ce « rien pour nous sans nous » comme un réflexe : en infectiologie, mais aussi en cancérologie, en diabétologie, en transplantation, etc.
Ce rôle de « défricheurs » en démocratie sanitaire, les acteurs.trices de la lutte contre le VIH et les hépatites doivent le poursuivre : parce que chaque avancée et invention dans ce domaine pourra profiter ensuite à tou.te.s.
Bonne rentrée !
Olivier Epaulard
* https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2022/cas-de-variole-du-singe-point-de-situation-au-20-septembre-2022
** https://www.ecdc.europa.eu/en/news-events/monkeypox-situation-update
*** https://www.cdc.gov/poxvirus/monkeypox/response/2022/mpx-trends.html
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