Infolettre Alpes sans sida 2020 – octobre 2020

Editorial, Professeur Olivier Epaulard, Président et infectiologue au CHU Grenoble Alpes

 

On pourrait faire des parallèles. Des rapprochements entre deux pandémies : celle qui a été détectée il y a près de 40 ans, qui était à l’œuvre depuis bien plus longtemps, et qui fait la raison d’être du Corevih ; et celle qui a été détectée en décembre dernier, qui a fait le tour du monde, qui a été à l’origine de mesures sociétales d’une ampleur absolument sans précédent, et sous la 2ème vague de laquelle nous vivons depuis quelques semaines. On serait tenté de comparer le nombre de morts ; la recherche d’un traitement, puis d’un vaccin ; les peurs qui ont été suscitées, l’incompréhension générée par la complexité de la situation et certaines déclarations contradictoires, et la stigmatisation à l’œuvre (mille fois démontrée hélas pour l’infection par le VIH, parfois évoquée aussi pour la Covid-19).

Mais ces parallèles, ces rapprochements, ces comparaisons, n’apparaissent finalement pas si valides. Ce qu’ont vécu depuis des décennies les PVVIH, ce qu’elles vivent encore, n’a probablement pas d’équivalent ; et à l’inverse, la crise aiguë que traversent nos sociétés du fait de la pandémie de Covid-19 et des mesures prises par les gouvernements est absolument sans précédent.

Et puis, on entend aussi parfois, après ces comparaisons :

  • « la pandémie de Covid-19, c’est sur elle qu’on doit se concentrer »
  • « le financement de la crise Covid nécessitera qu’on coupe dans les budgets moins importants, comme le VIH »
  • « en ces temps de Covid-19, le message sur la prévention du VIH, des IST, des hépatites, il est inaudible, ce n’est pas la peine de communiquer dessus ».

Or il nous semble que justement, il ne faut pas perdre de vue le fait que pendant la pandémie de SARS-CoV-2, la pandémie de VIH continue ; que si l’on détricote les mesures et les financements pour la prévention du VIH et l’accompagnement des PVVIH, c’est tout l’objectif « mettre fin à la pandémie » qui est mis en péril ; que de nombreux lieux de santé sexuelle en France rapportent une diminution des consultations pour initiation de PrEP, sans compter les difficultés dans le suivi des PVVIH qu’ont récemment rapportés certains centres ; que la distanciation physique recommandée n’a pas éteint les rencontres, et les prises de risque qui vont parfois avec.

Et plus qu’avant, c’est sans doute cela qu’il va falloir rappeler : le VIH est toujours là. Covid-19 ou non, nos buts aussi : zéro nouveaux cas de VIH, zéro morts liées au VIH, zéro stigmatisations.

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